LES ASSOCIATIONS DE L’EDUCATION POPULAIRE

Entre l’asphyxie, l’instrumentalisation et la marchandisation

En 1997, la dissolution de l’Assemblée Nationale a sauvé les mouvements complémentaires menacés de voir leur nombre de mis à disposition fondre comme neige au soleil !

Après  » l’intermède Jospin « , et l’arrivée du gouvernement actuel, certains ont pensé peut-être un peu trop rapidement que l’intégration de la dimension jeunesse dans un grand ministère de l’éducation allait permettre
– une reconnaissance du temps libre
– la mise en oeuvre d’une complémentarité école-temps libre.
Il n’en a rien été.

En 2003, les grandes associations d’éducation populaire ont eu droit à des  » étrennes de nouvelle année  » !? une baisse de 10% des crédits publics d’état alloués pour 2003.

Certaines associations et fédérations ont commencé à traduire cette annonce par une suppression du nombre d’emplois. Il s’agit là d’une première salve, avant un tir plus nourri ! Cette réduction risque d’être plus élevée en 2004 avec l’effet cumulé de la fusion-réduction des subventions éducation nationale-Jeunesse et sports et des économies budgétaires décidées par Bercy. Encore une fois, nous ne voyons ici que la partie émergée de l’iceberg ! Les directions départementales Jeunesse et Sports qui financent les actions menées localement par les différents mouvements d’éducation populaire ont reçu des crédits en forte diminution. C’est l’asphyxie qui menace de nombreuses associations et fédérations.

Parallèlement à cette offensive, le Ministre de l’éducation cherche à « instrumentaliser  » les organisations en faisant peser sur elles un chantage explicite :  » Pour obtenir un peu d’oxygène, il vous faut entrer dans nos dispositifs : les ateliers relais et la campagne pour l’engagement des jeunes « . Les ateliers relais sont assez largement financés puisque sans compter le personnel enseignant mis à disposition, 32 000 € sont attribués à chaque atelier; à comparer aux 800 000 € au total affectés pour tous les CEL.

Non content d’étrangler littéralement les associations, le gouvernement s’apprête à remettre en cause le pacte laïque existant dans ce pays.

Alors qu’un accord cadre liait les associations laïques : les CEMEA, les Francas et la Ligue de l’Enseignement, comme organisations partenaires dans le dispositif  » ateliers relais « , d’autres organisations deviennent partie prenante, l’ATD Quart Monde et les apprentis d’Auteuil.

Pour la première fois des associations confessionnelles rentrent dans un dispositif éducation nationale !?

Le pacte laïque est ainsi violé. Aujourd’hui, non contents de faire rentrer dans l’école publique des mouvements à caractère confessionnel, le gouvernement s’apprête à habiliter l’IFAC, institut de formation créé par la droite il y a une vingtaine d’années et machine de guerre attitrée contre l’éducation populaire.

Aucun laïque, aucun éducateur attaché au service public ne peut accepter cette attaque en règle contre l’éducation populaire et notamment sa composante laïque.

Avec l’asphyxie,  » l’instrumentalisation « , un autre péril guette les mouvements, c’est la  » marchandisation « . Depuis de nombreuses années les mouvements équilibrent leur budget à partir de deux sources de financement : les subventions publiques et les produits d’activités.

Le tarissement régulier de la source publique risque de contraindre les associations à privilégier la recherche de nouveaux marchés de formation au détriment de la mission première qui est l’éducation populaire. Déjà de grandes fédérations comme Léo Lagrange et la Ligue de l’Enseignement sont en concurrence sur de nombreux marchés publics : restauration scolaire, centres de loisirs, structures culturelles ou d’animation. Demain, le risque est de voir toutes les associations y compris celles qui jusqu’alors privilégiaient la dimension éducation et sociale, tomber dans cette dérive marchande, voire rechercher des fonds privés. La mobilisation générale de tous ceux qui veulent préserver un mouvement d’éducation populaire, attaché à ses valeurs, complémentaire à l’école publique, est nécessaire.

Ce combat est le même que celui mené par les personnels de l’éducation nationale contre le démantèlement du service public, il doit être mené conjointement avec toutes les associations complémentaires, avec les organisations syndicales qui doivent prendre en compte les enjeux sociaux, éducatifs et politiques.

Il est nécessaire que dans notre secteur, le front syndical qui commence à se construire, se consolide et qu’une rencontre organisée dans les plus brefs délais permette une expression et une action communes.

Le gouvernement a montré qu’il faisait fi des avis émis par des conseils consultatifs comme le Conseil National de l’Education Populaire et de la Jeunesse, puisque l’arrêté du 23 mars 2003 sur la question des qualifications n’a repris qu’une des trois modifications votées par ce même CNEPJ. Il nous faudra aussi réfléchir à la bataille qu’il nous faudra mener dans ces structures où tout semble décidé d’avance !